lundi 31 août 2015

Premier amour

En 1996, je suis tombée follement amoureuse. Nous passions beaucoup de nos week-ends ensemble, elle avait un copain depuis plusieurs années, et moi, je suis tombée sous son charme. Nous étions très proches, pas deux meilleures amies, mais plus que ça. Elle flirtait clairement avec moi, et vice-versa. En plus de notre entente, il y avait quelque chose de physique qui nous attirait. Je me souviens avoir été au cinéma avec elle. Plus de 2 heures, assises dans le noir, côte à côte. Et durant tout le film, elle m’a caressé l’intérieur du bras. Quand les lumières se sont rallumées, je n’ai pas su quoi faire, elle non plus. Je crois que c’est là que je me suis rendue compte à quel point elle était importante pour moi.
Quelques temps plus tard, je lui ai dit que j’étais amoureuse d’elle. Sur le moment, elle a été surprise. Nous étions dans un café, et comme souvent, nos mains se touchaient. Au moment où je lui ai fait part de mes sentiments, sachant qu’elle ne s’y attendait pas forcement, j’ai retiré mes mains, qu’elle a rattrapées très rapidement, en me souriant gentiment. J’ai cru un instant qu’elle et moi, ce serait possible, malgré nos 15 ans. C’était sans compter le fait qu’elle a trouvé dieu auprès des évangéliques. Je suppose qu’elle a eu droit à un lavage de cerveau fait dans les règles de l’art. En quelques semaines, elle est devenue une étrangère. Ou je suis devenue une étrangère, un vice, une maladie, une envoyée du diable qu’elle ne devait surtout pas côtoyer. Je la croisais dans les couloirs du gymnase, et elle ne m’adressait pas la parole, ne me regardait pas. C’est étrange, je n’ai aucun souvenir de comment j’ai réagis à ce rejet. J’ai sûrement été vexée, blessée, fâchée, mais je ne parviens pas à me rappeler.
J’ai quitté le gymnase et j’ai déménagé, pourtant, je ne l’ai pas complètement oubliée. Après tout, elle a été la première femme que j’ai aimée. Chaque année, pathétiquement, je lui envoyais une carte postale pour son anniversaire. Je me souviens toujours de la date d’ailleurs, malgré toutes les années qui ont passé. Chaque année, j’avais l’espoir qu’elle répondrait à ma carte. Et chaque année, je ne recevais rien. Jusqu’à ce que… En mars 2003, en rentrant du travail, un message m’attendait sur mon natel. Un sms, de sa part, me demandant des nouvelles, me remerciant pour mes cartes. On a discuté ensemble par sms interposés pendant quelques temps, puis nous nous sommes envoyés des mails. Elle m’a parlé un peu d’elle, du fait qu’elle était fiancée. Tout comme moi, elle était en dernière année d’apprentissage, à quelques mois des examens finaux, et nous nous sommes encouragées mutuellement. A l’époque, j’étais en couple avec ma toute première copine, et mes sentiments s’étant estompés, je considérais sérieusement à la quitter. J’en avais parlé à Ma qui m’avais dit de l’appeler le jour où je le ferai, car ce n’était pas un moment des plus joyeux. A force de parler par mail, nous avons décidé de nous revoir. 7 ans s’étaient écoulés depuis qu’elle avait décidé de me rayer de sa vie. 7 ans durant lesquels j’ai pensé à elle, de manière aléatoire, par forcément amoureusement.
Je me souviens de l’endroit où je l’ai revue : aux abords de l’école professionnelle. Nous nous étions mal comprises et nous n’étions pas sur la même route. Puis je l’ai vue, au passage piéton. Et un sourire énorme s’est dessiné sur mes lèvres, sans que je puisse m’en empêcher. Elle m’a dit, par la suite, que jamais auparavant, quelqu’un n’avait été aussi content de la voir. Je lui ai fait la bise, et j’ai senti son odeur. Durant toutes ces années, son odeur n’avait pas changé. Nous nous sommes vues plusieurs fois, parlant de tout et de rien. Elle m’avait bien fait comprendre qu’elle ne voulait pas savoir ce qu’il se passait dans ma chambre à coucher, étant toujours opposée à l’homosexualité. Un soir où nous nous étions vues, elle m’a demandé si elle pouvait prier pour moi, pour me remettre dans le droit chemin.


Et un jour, elle a commencé à me poser des questions sur ce que deux femmes pouvaient faire ensemble dans un lit. N’étant pas du tout une experte car n’ayant eu qu’une copine, j’ai répondu du mieux que j’ai pu, sans aller dans trop de détails. A force, et plus pour plaisanter qu’autre chose, je lui ai dit qu’elle devrait plutôt essayer au lieu de poser des questions auxquelles je ne pouvais pas répondre. Et c’est à ce moment-là qu’elle m’a demandé, avec un sourire, s’il m’était arrivé de repenser à elle comme à l’époque. Oui. Oui, je l’aimais encore. Elle me faisait vibrer. J’ai répondu à sa question. Et une semaine après, nous avons passé la nuit ensemble. Cette nuit-là a été le début d’un amour intense, douloureux, merveilleux, destructeur. Mais la douleur et la violence de cette amour, j’en parlerai un autre jour.

mercredi 12 août 2015

Envie du soir

Parfois, quand je marche à ses côtés, j'ai envie de lui prendre la main. Parfois, quand je la vois, j'ai envie de la prendre dans mes bras et de la respirer. Parfois, quand je la vois dormir, je souris de voir son visage enfin détendu, et j'ai envie de lui déposer un baiser sur le front. Parfois, quand je regarde ses yeux, j'y disparais, sans aucune envie de revenir à la réalité. Parfois, elle est là et pourtant, elle me manque et j'ai envie de lui dire, de lui crier "je t'aime, aime-moi, même un tout petit peu".

Mais l'envie de ce soir n'est que ça, une envie, un fantasme, une illusion.

mardi 4 août 2015

Qui ne dit mot consent? Non!

La nuit dernière, je me suis retournée dans mon lit durant plus de deux heures. Je n'arrivais pas à dormir. Je réfléchissais trop. 

Je pensais à ce que j'aurais pu dire et faire samedi soir. Ce que j'aurais dû dire et faire. A-t-elle raison? Aurais-je dû encore plus la défendre puisque c'est mon ex amante et mon amie, que j'ai encore des sentiments pour elle?

Avec le recul, et dès notre arrivée chez elle, j'avais de superbes phrases à dire à ces gars: "Non, en fait, c'est moi que tu as voulu baiser, mais tu n'es pas arrivé à bander et tu avais une toute petite bite". Histoire de l'humilier devant ses potes. Et si j'y avait pensé sur le coup, que se serait-il passé? Ses potes auraient-ils rigolé de lui et nous auraient-ils lâché la grappe? En seraient-ils venus plus violents, tant verbalement que physiquement?

Je dois dire que j'ai déjà eu défendu mes amies contre ce genre de harcèlement de rue, mais c'est la première fois que j'entendais de tels propos. Jusque là, je n'avais entendu que des "hey, viens boire un verre", "hey ma jolie, viens on va danser". Certes, tout aussi pénibles et inappropriés, mais d'une violence verbale tout autre.

Je ne me cherche pas d'excuse, je n'en ai pas. J'ignore pourquoi je n'ai pas réagis. J'étais malade, émétophobe, je luttais contre les nausées, mais ce n'est pas une excuse. Tiens, j'aurais pu lui vomir sur les pieds... Non, ce n'est pas drôle. Je n'ai pas réagi, j'ai déçu une amie qui n'a pas compris mon comportement, qui s'est sentie encore plus en danger parce que je n'ai rien fait. Je n'ai aucune excuse. D'autant plus que quand ça m'arrive lors de mes soirées à bosser dans des bars, je sais exactement quoi dire pour que le mec se la ferme. 

Cependant, mon silence et mon manque de réaction lors de cet évènement ne signifie absolument pas que je cautionne le comportement de ces trois connards.

dimanche 2 août 2015

Harcèlement de rue

Il est 23h42, c’est le 1er août. Malade, je suis rentrée à pied après les feux, accompagnée d’une amie chez qui je dors ce soir. A 100 mètres de chez elle, trois hommes, alcoolisés, l’interpellent. L’un d’eux se montre particulièrement entreprenant, l’appelle par un prénom qui n’est le sien, essaie de l’attraper par le bras. Elle se décale et il continue de parler : « hey Nathalie ! Souviens-toi, t’étais tellement bourrée, je t’ai baisée. Je te prise par tous les côtés, tu as adoré ça, de tous les côtés et tu as reçu un orgasme ». On l’a entendu sur quelques mètres encore. Je n’ai plus dit un mot, connaissant mon amie et l’énervement et le ras-le-bol qui la submergeaient. Nous arrivons chez elle, toujours sans un mot. Elle enlève sa blouse et reste en débardeur. Elle part dans sa chambre et j’entends taper. Des paos. Des coups de coudes, de poings, de genoux. Et que personne ne vienne mettre en avant son habillement. Un pantalon, une chemise, un veste. Quelque chose de très sobre, qui ne montrait pas un seul bout de peau. Et même si elle avait été en jupe et débardeur, la façon de s’habiller n’est aucunement une invitation. Que les gens qui disent que telle ou telle femme a cherché les ennuis vu sa manière de s’habiller aient honte d’avoir de pareilles pensées, d’oser juger quelqu’un ainsi.
Dans quel monde vivons-nous ? De quel droit un homme se permet-il d’accoster ainsi une femme, de lui manquer de respect, de l’insulter ? Qu’on ose encore dire que le sexisme n’existe pas. Ces dernières semaines, elle m’a fait part hebdomadairement de ce genre d’incidents. Ça me mets hors de moi. Si j’avais eu le courage et la présence d’esprit, j’aurais dit quelque chose à ce mec. Je ne l’ai pas fait. Par peur ? Par lâcheté ? Je l’ignore. Et si j’avais eu le courage, aurait-il continué, en serait-il venu aux mains, aurait-il été surpris que je lui réponde et aurait-il cessé ? Ne pas se sentir en sécurité est terrible. Pourtant, ce genre de comportement existe encore. C’est intolérable.
J’aimerais me lever, aller la voir et la prendre dans mes bras pour lui apporter mon soutien d’une quelconque manière, lui dire que c’est rien. Mais ce serait mentir, ce n’est pas rien. C’est un fléau qui continue d’exister car nous vivons dans une société patriarcale où on append aux hommes qu’ils nous sont supérieurs, qu’ils valent mieux qu’une femme, qu’elle n’est qu’un objet. Et ce fléau perdurera tant que ce genre de comportements sera encouragé par l’éducation des parents, dans les clips, par les médias, par les films, par les articles de magazines. Nous ne sommes pas des objets, mais les hommes ne veulent pas l’accepter, le comprendre. Il y aurait encore tant à dire mais les mots me manquent. Ils ne sont pas assez forts pour dépeindre cette situation humiliante, rageante, intolérable.